Oeuvres de BOTTESINI, ECCLES, MIROUZE, ZBINDERN, CRENNE
Ensemble J.S. Bach, Marc Bleuse - Arion ARN 1981
Malgré ses 1.80, la contrebasse s'est taillée une place importante dans la musique classique, le jazz et... le roman policier.
C'est Bottesini (1821-1889) qui l'a sortie de la fosse (d'orchestre) où Gluck, Mozart et Beethoven l'avaient introduite. Avec lui, elle devient instrument de virtuosité, qui exige une littérature spécifique. Dans le jazz, elle deviendra l'élément essentiel de la cession rythmique, avec le piano et les percussions. Ses serviteurs se sont fait une spécialité du pizzicato, et ont presque tous abandonné l'archet.
Michel Crenne compte parmi les meilleurs contrebassistes actuels. Par ce disque, il a voulu rendre hommage à l'instrument de sa passion. Du XVIII° au XX° siècle, il a choisi des oeuvres significatives qui mettent en valeur la finesse toute française de l'ensemble Bach et de son chef Marc Bleuse. Celles de notre époque, mêlant jazz et propos savants, nous ont semblé, quoique très académiques, les plus intéressantes. Car les plus porteuses d'avenir. La composition de Michel Crenne confine avec talent au mystère. Car dans les boîtes à contrebasse, les cadavres ne portent pas la queue de pie !
JEAN VERMEIL
Oeuvres de TCHAÏKOWSKY et de PROKOFIEV.
Ensemble Kammerensemble de Paris
Quintette en sol mineur, Opus 39 pour hautbois, clarinette, violon, alto et contrebasse
Musiciens : Violon : Jean-Claude BOUVERESSE; Alto : Marie-Christine WITTERKOER; Contrebasse : Michel CRENNE ; Clarinette : Philippe CUPER; Hautbois : Jean-Louis CAPEZZALI.
Composé en février 1924, le Quintette Op. 39 est le résultat d'une commande faite à Prokofiev par le chorégraphe Boris Romanov.
Le premier mouvement s'ouvre sur un thème d'une subtile ironie, repris alternativement par le hautbois et la clarinette. Deux variations se succèdent alors : la première,
nostalgique, est introduite par l'alto; la seconde, un "Vivace con brio" est un tourbillon endiablé emmené par le violon avant le retour du thème initial.
L'"Andante energico" donne ensuite la parole à la contrebasse en solo. C'est une sorte de "danse de l'ours où se mêlent le sérieux et la parodie sur fond de chromatisme.
Le troisième mouvement, d'une grande difficulté rythmique (Prokofiev en propose deux versions écrites avec des mesures différentes, mais donnant le même résultat sonore ! ) possède une métrique particulière, destinée à donner une impression d'instabilité. Il s'achève à l'unisson, sur une pirouette éblouissante.
L' "Adagio pesante" est, par contraste, une musique d'orgue de barbarie, volontairement régulière et monotone. Elle requiert, de la part du hautboïste, une prouesse technique car le souffle y est mis à rude épreuve.
C'est à la clarinette que revient la vedette dans le cinquième mouvement très bondissant "Allegro precipitato"; le haut bois lui répond et les cordes, "pizzicati" ou "arco" (c'est-à-dire avec ou sans l'archet) sont invitées à les accompagner "férocement" (l'indication est de Prokofiev).
Le Quintette se termine sur un "Andantino" souverain. On y retrouve toute la gamme des sentiments, des couleurs et des impressions chers à Prokofiev : lyrisme, douceur, suavité, nostalgie, ivresse rythmique, tendresse, violence. L'écriture y est admirable et les cinq instruments également mis en valeur. Une dernière course, confié à la clarinette puis aux cordes seules, conclut ce ballet.
Jean-Claude BOUVERESSE